Pap Ndiaye n’est peut-être qu’un argument électoral pour la gauche radicale, un feu de paille sacrifiable sur l’autel d’un prochain remaniement. En attendant, la capacité d’Emmanuel Macron à cocher toutes les cases du projet de société vomi par les conservateurs est assez hors norme. La droite, elle, orpheline de LR et de Nicolas Sarkozy, est congénitalement compatible avec le macronisme. Tout le discours déroulé depuis cinq ans, de clin d’œil en clin d’œil (« start-up nation », « traversez la rue… », etc.) flatte le matérialisme persistant de l’électorat historique d’un Sarkozy. Pour ceux qui voient le monde du travail comme une course olympique ouverte à tous, selon un narratif égalitariste inspiré de la culture américaine du self-made man, le macronisme est l’incarnation charismatique et redoutablement efficace, parce que débarrassée d’un reste de valeurs traditionnelles « périmées », d’une droite économiquement décomplexée.
Macron, c’est la droite qui gagne parce qu’elle n’hésite plus entre Mamon et Jésus. Une droite qui n’est plus de droite, parce qu’elle ne connaît que les réponses techniciennes aux problèmes de civilisation, autoroute vers l’idolâtrie de l’argent, flatteur des plus bas instincts. Soumise à l’argent, la droite est nécessairement de gauche parce que la gauche, c’est le progrès. Et le progrès, c’est l’argent : la vulgarité publicitaire, le crédit à la consommation pour satisfaire ses pulsions de classe moyenne déclassée, la chirurgie de changement de sexe pour le petit dernier… Collard avait tort : Cohn-Bendit n’est pas un traître. De Mai 68 à l’euthanasie, il est resté fidèle à lui-même.
Pécresse ne pouvait pas gagner parce que la droite était déjà morte. La première victime de la victoire d’Emmanuel Macron en 2017 n’est pas le Parti socialiste. C’est la droite. Sarkozy président, trahissant toutes les promesses de Sarkozy candidat (explosion des entrées, discrimination « positive », éloge de la « diversité » et du métissage à tous crins…), avait tué la droite une première fois. Macron, c’est Sarkozy moins le karcher, Sarkozy moins le grand débat sur l’identité nationale. Macron, c’est Sarkozy décomplexé.
Maintenant que la droite ne fait plus semblant d’être patriote, elle a tout le loisir de s’assumer enfin de gauche, avec son cortège de mesures libertaires, jumelles du libéralisme financier. Macron, c’est l’unité du libéralisme retrouvé. « J’ai défendu 40 ans le même principe : liberté en tout, en religion, en littérature, en philosophie, en industrie, en politique, et par liberté j’entends le triomphe de l’individualité », s’exclamait Benjamin Constant (préface aux Mélanges de littérature et de politique, 1829). « Pour la pensée, écrivait-il encore, pour l’éducation, pour l’industrie, la devise des gouvernements doit être : Laissez faire et laissez passer » (Commentaire sur l’ouvrage de Filangieri, 1822).
C’est le libéralisme, le vrai, qui est au pouvoir. Ce quinquennat est un cap décisif. Hurler avec les hyènes de la droite cocuservatrice contre la « gauchiste » Elisabeth Borne, qui a supprimé le statut des cheminots en 2018, est d’un ridicule accompli. On affrontera efficacement le dernier round de la Macronie si l’on combat avec le bon logiciel : la liberté économique pour les PME, la fin du gavage pour les gros, le peuple des producteurs contre la meute des spéculateurs, l’équité fiscale et la justice sociale.
Julien Langella
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